"L’EMDR, la nouvelle médecine anti-stress". Yvonne Renault, Psychologue à Nice
26 juillet 2019
Contre les phobies ou les douleurs psychosomatiques, l’EMDR obtient des résultats étonnants. Les explications de Jacques Roques, psychanalyste et psychothérapeute : la technique s’est fait connaître par ses résultats dans le syndrome de stress post-traumatique. Mais ce n’est pas sa seule application, loin de là.
• Qu’est-ce que l’EMDR ?
Derrière ces initiales se cache la thérapie par mouvements oculaires de désensibilisation (« Eye mouvement desensitization and reprocessing » en anglais), inventée en 1987 par la psychologue américaine Francine Shapiro. Celle-ci découvrit par hasard qu’un mouvement des yeux de gauche à droite apportait un état de mieux-être. Cette discipline fut popularisée en France six ans plus tard par David Servan-Schreiber grâce à l’immense succès de son livre « Guérir ». Objet de nombreuses recherches scientifiques, la méthode est reconnue aujourd’hui, notamment par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et par la Haute Autorité de santé française.
• Comment ça fonctionne?
Lors d’un traumatisme, quelque chose se bloque dans le cerveau émotionnel, entraînant une sorte de court-circuit qui empêche de « digérer » l’événement effrayant. Les mouvements des yeux constituent une stimulation sensorielle qui abaisse l’intensité des émotions. Revivre le mauvais souvenir dans ce cadre sécurisant permet de débloquer la mémoire et la mauvaise expérience peut alors être traitée normalement.
• À qui s’adresse la thérapie ?
Elle est recommandée dans le traitement des stress post-traumatiques (guerre, attentat, accident, agression…) mais elle est aussi utile face à des événements moins exceptionnels: deuil, séparation, peurs inconscientes entraînant des crises de panique, des phobies, des cauchemars ou une dépression. Elle aide également à se libérer de dépendances (alcoolisme, tabagisme, toxicomanie, anorexie/boulimie) découlant souvent d’événements traumatisants. Elle est parfois conjuguée à d’autres méthodes (hypnose, relaxation).
• Comment se déroule une séance?
Chaque séance est consacrée à un point précis, en commençant par les plus gros blocages. Après avoir identifié les principaux problèmes qui gênent la vie quotidienne et établi une relation de confiance avec le thérapeute, le patient est invité à revivre le moment douloureux, tout en suivant des yeux de gauche à droite les gestes du thérapeute. Cela peut entraîner des pleurs, des nausées, la gorge nouée… Mais rapidement, la stimulation sensorielle, qui peut aussi s’effectuer par des sons ou des tapotements alternatifs sur les genoux, induit un climat de détente. L’émotion retombe, permettant de relancer le mécanisme naturel de traitement de l’information par le cortex. À la fin, le souvenir est toujours là mais il ne provoque plus de stress. La vie redevient plus légère.
• Comment trouver un thérapeute sérieux?
Le site www.emdr-france.com recense les psychologues, psychiatres et psychothérapeutes ayant suivi une formation rigoureuse. En moyenne, la guérison intervient en cinq à dix séances, mais un mieux-être se manifeste avant. « Une séance peut suffire pour se débarrasser de ses angoisses ou d’une phobie liées à un choc unique, précise Jacques Roques. En revanche, les cas les plus complexes liés à des années de mal- traitance peuvent requérir jusqu’à un ou deux ans de thérapie. » Les séances durent soixante ou quatre-vingt-dix minutes. Leur rythme est variable (une à quatre par mois), tout comme leur coût (de 50 à 70 euros de l’heure en moyenne). Elles ne sont remboursées que si elles sont prescrites par un médecin généraliste et pratiquées par un psychiatre. Elles sont quasi gratuites à l’hôpital ou dans un centre médico-psychologique.
• Témoignages
« Je me sens plus forte », Anne, 58 ans, Sevran
« Mon mari est décédé après une longue maladie. Je l’ai accompagné sans m’accorder de repos. Après son départ, tout a lâché, j’ai perdu le goût de vivre. C’est ma fille qui m’a conduite chez ce thérapeute. Ça secoue, mais dès la première séance, j’ai eu l’impression de m’alléger. J’ai pu soigner ainsi plusieurs événements douloureux dans ma vie. Désormais, je me sens plus forte. »
« Je suis redevenu ce que j’étais avant », Olivier, 67 ans, La Rochelle
« Après un grave accident de voiture, je m’en suis remis physiquement. Restaient les cauchemars, me renvoyant toujours les mêmes images, sons, lumières de la voiture des pompiers… Au volant, j’étais angoissé. Après les séances d’EMDR, je me sentais vidé mais assez vite, j’ai trouvé un meilleur sommeil et commencé à éprouver moins de tristesse. Jusqu’à redevenir celui que j’étais avant! »
« Ma personnalité s’est épanouie », Jean-Claude, 79 ans, Laon
« Tant d’années ont passé. Pourtant, je ne m’étais jamais remis de mon service militaire en Algérie. Grâce à l’EMDR, en trois séances, j’ai été totalement libéré. Cela peut paraître aberrant à mon âge. Pourtant, j’ai l’impression que ma personnalité s’est enfin épanouie. Ma vie de couple s’est bonifiée à un niveau inespéré! ». (Christine Desmettre, le 26 juillet 2019).
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